[historique] Zamie, quelques grammes de violet...

Efferalgan s’approcha dans l’obscurité de sa sœur, Zamie. A la lueur de la lune, elle la voyait, à califourchon sur une branche, la joue écrasée sur l’écorce, qui dormait… « Tu dors ? » osa-t-elle d’une voix timide… Pas d’autre réponse que la respiration lente et régulière de Zamie. Elle redressa une mèche de cheveux violets de la dormeuse puis, s’étant assurée que celle-ci était bien plongée dans un profond sommeil, elle lui fit une affreuse grimace, défigurant son mignon visage de jeune éniripsa.
Puis la petite peste décrocha doucement la besace de Zamie, et l’emporta sur une branche plus haute.
Avide de percer les secrets de sa sœur, elle ouvrit le sac. Fébrilement, elle posa en équilibre sur la branche ce qu’elle y trouva…

* une briochette et quelques petits pains
* un flacon rempli d’un liquide violet, dans lequel baignent une rose et une écorce d’abraknide sombre
* des bonbons
* une bourse en cuir de boufton blanc contenant quelques kamas
* une vieille lettre, cornée et en partie déchirée, emballée dans une feuille de kokotier
* des épis de blé et de houblon
* un fragment de coquille de dragoeuf marquée d’une tâche rouge sombre
* un verre à bière de la taverne en bas à droite
* un anneau du mental brisé
* une vieille rune poussiéreuse

« Ma grande,
Quand tu liras ceci, il sera sans doute déjà trop tard, mais quoiqu’il arrive sache que mon cœur et mes pensées seront toujours avec toi. Mon esprit t’accompagnera toujours, et tu as déjà en toi, j’en suis sûre, la force et le courage nécessaire pour t’en sortir.
Prends bien soin d’Efee, elle est encore si petite, elle aura besoin de ton aide. Elle sera ton antidote. Apprends lui, comme nous l’avons fait pour toi, à être courageuse, sage et pacifique.
N’oublie pas, ma chérie : sois digne de ton nom et des valeurs de notre famille. Sache que chaque chose offerte, du sourire à une fortune, t’apportera toujours plus d’amour et de force.
Nous t’aimons, et un jour le dieu Féca nous réunira tous, alors sèche tes larmes et avance, toujours en gardant le regard au loin et l’amour dans les mains.
Ta maman,
Nahlya »

Efferalgan replia la lettre, et se décida à ranger toutes les affaires de Zamie… Elle connaissait déjà depuis longtemps l’existence de cette ultime trace écrite de leurs parents, mais en l’avait jamais lue… Elle était partagée entre la joie d’avoir pu accéder à cette lettre, la culpabilité de l’avoir lue en cachette de sa sœur, et la tristesse des souvenirs. Leurs parents, Robu et Nahlya. Tous les 2 fécas. La force de son père, ses pains et brioches délicieux qu’il ramenait à la maison, son rire tonitruant, les longs cheveux de sa mère, violets comme ceux de Zamie, qui sentaient si bon la violette, sa voix douce, ces gestes lents devant le laboratoire d’alchimie installé dans un coin de leur maison… Elle n’en avait pas beaucoup de souvenirs, et Zamie en parlait si peu.
Efeeralgan avait bien essayé de lui faire raconter leur enfance, les histoires familiales, toutes ces petites anecdotes qui faisaient revivre leur maison dans leur cœur pendant quelques instants plein de nostalgie, mais Zamie n’aimait pas cela, elle disait que cela faisait revenir d’autres images, qu’elle voulait oublier. Et bien souvent, dans la nuit, après, elle faisait des cauchemars, à en tomber de sa branche d’arbre.
Comme ce soir, tiens, justement… Efeeralgan, en remettant le besace en place, voyait le dos de sa sœur se soulever plus vite, sa respiration était saccadée, de petits gémissements s’échappait de sa bouche tandis que ses poings se serraient sur l’écorce dure… Prise de remords, la petite éni s’assis près de sa sœur et lui caressa doucement les cheveux, en chantant une douce berceuse, pour la calmer dans son sommeil…

Je ne vais pas tenir, pas tenir, j’ai si froid, ne pas se retourner, maman a dit, ne pas… Courir, tenir, courir, tenir, l’arbre est tout près, derrière lui la forêt, courir, tenir, se cacher… Tenir, tenir… mes poumons vont exploser, il n’y a donc plus d’air ici ! L’arbre, l’arbre, ne pas se retourner… J’y suis presque… Tenir, courir, ne pas lâcher Efee, ne pas… Rhaaaaaaa ! Le bruit, partout, dans le ciel, ces sifflements, ça fait comme dans ma tête, comme dans mes poumons, y’a plus rien qui passe, plus d’air, je vais… NE PAS LACHER EFEE, NE PAS SE RETOURNER…
Mais c’est pas vrai, j’avance plus ou l’arbre s’éloigne? Courir, courir… Mais, c’est quoi, ça ?! Ca me tire en arrière, NE PAS ME RETOURNER !! Je peux plus avancer, je peux plus… Respirer… EFEE ! ELLE TOMBE ! La rattraper, vite, je ne peux… plus… avancer… respirer… C’est… C’est quoi, ça !!

Un sifflement, l’étouffement, des cris derrière elle, déchirants, un dernier regard en arrière… Une ombre noire, immense, s’abat sur Zamie, l’étouffe et elle tombe, tombe, tombe…

Zamie se frotta l'épaule et porta les mains à sa tête : la chute avait été rude, elle en serait quitte pour une belle bosse encore une fois. Autour d'elle, les bruits étaient confus : de petits animaux s'enfuyaient, perturbés par son inopportune et brutale arrivée au sol, au loin le craquement caractéristique d'un abraknyde, et au dessus d'elle les mouvements furtifs d'Efeeralgan qui descendait de son perchoir. Celle-ci prononça les doux mots revitalisants et la douleur de Zamie se dissipa.
- Tu as encore fait des cauchemars? lui demanda-t-elle d'un air penaud, qui lui mit la puce à l'oreille,
- Hm... Et toi tu as encore fouillé dans mon sac, hein?
Efeeralgan baissa la tête et sembla soudainement absorbée par la contemplation de ses pieds. Zamie soupira et s'approcha d'elle :
- Bon, allez, c'est rien... Merci pour tes soins puce. Tu ne dormais pas?
- Non... Zam Zam?
- Oui puce?
- Euh... C'est quoi dis, tes... Tes rêves?
- Oh Efee tu le sais, ce sont des images, des impressions fugaces et douloureuses, du jour où nos parents sont morts. Je te l'ai déjà dit...
- Non justement, tu ne m'as jamais rien dit!
- ...
- Zam Zam, je suis assez grande, maintenant... je veux savoir! S'il te plaît, allez.... Et puis si tu veux, comme ça, je partage les cauchemars!
Zamie attrapa sa petite soeur et la serra contre elle, touchée par sa naïveté et son amour. Oui, il était temps qu'elle sache. Elle s'adossa à l'arbre, Efeeralgan installa sa tête sur ses genoux, et, après une profonde inspiration, Zamie commença à parler...

Il a fait si chaud cette nuit, j’ai rejeté les couvertures au sol dans mon sommeil. Dans mes songes, il y a des cris, des bruits de pas précipités, des portes qui claquent… Non ça ce n’est pas dans mon rêve. J’ouvre les yeux : le jour se lève à peine, la chaleur me rend amorphe, mais pas de doute : ce brouhaha est bien réel. Je me lève et me dirige vers la fenêtre. Dans son petit lit , Efeeralgan dort encore à poings fermés. Avant que j’aie eu le temps d’écarter les rideaux, j’entends quelqu’un grimper à l’échelle qui mène à notre chambre : Maman se précipite vers moi, étrangement pâle : « Zamie, ma grande, il va falloir être forte. Nous sommes en danger, il faut que tu ailles te mettre en sécurité, et que tu emmènes ta sœur. » Cette fois-ci je suis parfaitement réveillée, mais je ne comprends pas… Je reste sans voix, tandis que maman, qui a déjà pris Efeeralgan dans ses bras, sort de sa manche une petite fiole qu’elle glisse entre les lèvres de la petite éni : « Avec ça, elle dormira encore quelques heures. Elle ne doit pas faire de bruit. Toi non plus » me dit-elle en la mettant dans mes bras. Je sens la chaleur du petit corps d’Efee contre moi, mais mes mains sont glacées. « Suis-moi, vite ! ».
Nous descendons, papa n’est pas là, les gestes de maman sont rapides et précis. Elle attrape un sac et le remplit de nourriture, d’une cape, de bijoux… Dehors, les bruits s’intensifient, j’entends papa appeler son ami sram : « Galud, là, il y en a un autre ! Derrière la maison ! » D’autres cris, des gens qui courent, des pas, pesants, un brouhaha qui se rapproche… Je sens une boule dans mon ventre. La voix étranglée de papa, la pâleur de maman…
« Maman, mais qu’est-ce que… »
« Il faut que tu te caches ma chérie, et que tu protèges Efee. Les dragoeufs approchent du village, ils sont nombreux, nous allons tous devoir nous battre, et toi, il faut que tu te sauves » Elle accroche le sac à mon épaule, et plonge son regard dans le mien. « Ecoute-moi bien. Tu vas sortir derrière moi, sans faire de bruit, et je veux que tu courres, le plus vite possible, vers le grand chêne. Ne te retourne pas, cours vers la forêt, grimpe dans un arbre et attends. Ne bouge pas, ne fais pas de bruit. Je viendrai vous chercher avec ton père dès que tout sera fini. Tu as bien compris ? Cours, et ne te retourne pas ! »
Je sens les larmes monter, je fais « oui » de la tête, et maman me serre contre elle. Elle nous embrasse sur le front, Efee et moi, puis se dirige vers la porte. Elle attrape son bâton et un sac de potions de soins, me demande si je suis prête.
J’ai la gorge serrée. Le bruit est terrible dehors. J’ai peur. Je serre Efee contre moi, et relève la tête.
« Allons-y »

Tout à coup ça devient réel. Les bruits correspondent à des images, qui font mal. Je voudrais fermer les yeux, me boucher les oreilles, mais ça ne changera rien. C’est trop tard. Je suis en plein dedans, plus de retour en arrière possible. Alors je fonce, droit devant…

Maman court vers Papa et Galud. Face à eux, un dragoeuf, immense. Partout dans le village, des groupes de deux, trois guerriers face à l’un de ces monstres.
Papa se retourne, nous voit Efeeralgan et moi , il crie quelque chose mais je ne l’entends pas, le bruit des combat couvre tout.
Galud nous a vu lui aussi. Il lance une invisibilité sur nous. Le regard de mes parents devient flou : ils ne nous voient plus. J’aurai voulu leur faire un signe, il n’est plus temps. Il faut partir, courir, se cacher.
La gorge serrée, je leur tourne le dos, je me faufile sans un bruit entre les maisons.
Sur ma droite, tout à coup, un immature, poursuivi par des voisins. Il me frôle, ne me voit pas, je fonce.
Je sens une sueur glacée couler dans mon dos.
Mes bras sont tétanisés sur Efee.
Je sors du village.
Mes jambes ne sont pas aussi rapide que les battements de mon cœur.
Je gravis la colline. En haut, le chêne. Derrière, la forêt.
Je cours, cours, cours…

Tout à coup un sifflement, une ombre immense qui couvre la forêt, passe au dessus de moi. Prise de panique, je lève la tête : LA DRAG ! Elle fonce droit vers le village… Je suis son parcours des yeux. Elle lâche une pierre, énorme… Comme au ralentit, je la vois s’écraser, lourdement sur Galud. Mon père est projeté en arrière par le choc. Maman se précipite sur lui. Trois dragoeufs foncent droits sur eux.
Je hurle.
Ils m’ont entendu.
Nos regards se croisent au moment ou un dragoeuf écrase Papa contre le mur, et où Maman est projetée de l’autre côté de la place par un autre, marionnette disloquée....
Mon cri s’évanouit dans ma gorge.
Je reste tétanisée, sans voix, mon corps est une pierre sèche et froide qui ne bougera plus jamais…

Mais ils m’ont vu. Galud est mort et je ne suis plus invisible, Efee non plus. Je pose mes yeux sur elle, et le sang circule à nouveau dans mes veines.
Je suis presque sous les branches protectrices du chêne… Je dois faire ce que Maman m’a dit.
Je me retourne, m’engouffre dans la forêt, plus loin, plus loin, je cherche l’arbre le plus grand, le plus solide…
Un orme face à moi, je grimpe, trouve une branche large et stable.
Je m’y installe, et, en silence, je pleure…

"Voilà Efee, maintenant tu sais..."
Les yeux de Zamie étaient restés secs, sa voix claire. Le passé était le passé... Mais l'avoir raconté avait fait se dissoudre la boule d'angoisse qu'elle sentait toujours dans son ventre. Les mots de son récit, comme des bulles de savon, étaient sortis de sa bouche, légers, pour éclater sans bruit un peu plus loin.
Zamie caressa les cheveux de sa soeur : "ça va puce? Tu n'as pas froid?" Efeeralgan frissonnait, autant à cause de la rosée qui perlait sur les brins d’herbe qu’à cause des images que les paroles de sa sœur avaient fait vivre dans sa tête. Elle escalada les genoux de Zamie, se serra contre elle : « Et après ? Quand on est redescendu de l’arbre ? »
« Nous sommes restés trois jours entiers dans l’arbre, puce. Je savais que Papa et Maman ne viendraient plus nous chercher, mais je ne savais pas quoi faire… Quand il n’y a plus rien eu à manger dans la besace, je me suis décidée à aller voir… »
« … C’est là qu’on a trouvé Mamo ? » demanda Efeeralgan en se redressant brusquement, les yeux brillants. Zamie sourit : « Oui, enfin, c’est plutôt lui qui nous a trouvé ! »

de Galud à Mamoru :

« Mamoru,
Depuis quelques temps les dragoeufs sont à nouveau agités. Aux alentours du village, ils ont déjà attaqué des paysans. Nous craignons une attaque massive, à l’image de celle de 436… L’aide de tout guerrier ami nous serait la bienvenue.
Je compte sur toi,
Galud »

posté le 14 juinssidor 627, reçu le 29 juinssidor 627…
le MSPSPD vaincra !!!

(HRP : en savoir plus sur le MSPSPD ? c’est ici : http://forum.dofus.com/topic.php?id=1104)

(HRP : ici, c'est Mamoru qui parle, pas Zamie! ^^ )

Saleté de bwak stupide ! Il m’a cherché en Amakna alors que j’étais sur l’île des wabbits…
Sitôt, j’ai réuni mes compagnons. On a fait le voyage aussi vite qu’on ait pu… On a même essayé de dresser une dragodinde, mais malgré tout, à notre arrivée au village, la bataille avait commencé.
Les dragoeufs avaient pris d’assaut le village dès l’aube, les villageois dormaient encore, et pour la plupart, ils n’avaient pas eu le temps de fuir. Le soleil était déjà haut dans le ciel quand nous avons enfin pu nous joindre à eux, il y avait déjà tant de morts… Nous étions une trentaine, très vite les dragoeufs se sont repliés et ont battu en retraite… Autour de nous, c’était la désolation et le désespoir : les villageois pleuraient leurs amis, leurs voisins disparus, et surtout la fin de leurs rêves pacifistes…

Les jours suivants, craignant une nouvelle attaque, mes compagnons et moi montions la garde aux abords du village. Pendant ce temps là, les rescapés s’affairaient pour leur départ.

Au 3ème jour, je me suis retiré un moment dans la forêt, j’avais besoin d’être seul…
Le silence y était oppressant, comme si tous les animaux étaient en deuil… J’étais fatigué par le voyage, le combat, ma déception d’être arrivé trop tard, ma tristesse d’avoir perdu Galud…
Je fus tiré de mes pensés par une pomme de pin lancée à toute volée droit sur ma tête. Depuis quand les écureuils savent-ils viser ? En levant la tête, j’eu la surprise de découvrir une petite éniripsa qui pouffait de rire. Devant ma mine surprise, elle éclata de rire si bien qu’elle en tomba de sa branche ! Je la cueilli de justesse, ce qui la fit rire encore d’avantage : « Z’allais pas tomber ! Ze tombe zamais ! Ze suis très forte pour monter dans les narbres, et pour descendre aussi ! Comment tu t’appelles ? Tu vas au village ? Tu m’emmènes ? Ma sœur est partie là bas tout à l’heure, on y va ? C’est elle qui t’envoie me chercher ? Tu la connais ma sœur ? Elle s’appelle Zamie ! » « Jamie ? » « Mais non, Zamie ! » « Ah… ».

Je ne savais plus trop quoi penser. J’étais venu chercher le calme je me retrouvais avec une éni babillante et zozotante sur les épaules, apparemment complètement ignorante des derniers évènements.

A la vue des premières maisons, elle s’écria : « Là ! C’est mon village ! Et là… » et sa voix s’éteignit brusquement. Sa lèvre commençait à trembler, et en quelques instant son bavardage se transforma en hurlements et en pleurs… Sur la place, quelques villageois se retournèrent aux premières larmes de ma petite protégée, et une jeune féca se précipita vers nous. « Zamiiiiiiiiiiiie » hoqueta la petite éni en se ruant dans ses bras. Elle l’emmena plus loin, essuya ses larmes et la berça, tandis qu’un des villageois m’expliquait que leurs parents étaient tous les deux morts dans l’attaque, Robu et Nalya, des amis de Galud. Zamie avait emmené sa sœur dans la forêt, elle venait juste de revenir au village… Nous avions du nous croiser.

Elles n’avaient pas vraiment le choix : elles aussi devaient partir avec la petite troupe dans un endroit plus calme. Zamie est entrée dans la maison dévastée de ses parents, et n’en est ressortie qu’avec quelques vêtements pour elle et sa soeur et de petits objets. Elle ne voulait rien emmener, pas de meubles, pas de livres, pas d’équipement… Elle s’est préparée à l’exode comme on part en voyage, un petit baluchon à la main. Efeeralgan était cramponnée à elle, les yeux pleins de larmes.

Le lendemain matin, nous avons tous pris la route.

(Exterieur jour – Alternance de paysages de plaines et de forêts – Un groupe de marcheurs, quelques charrettes à bras, un petit groupe de bouftons mené par leur berger – En équilibre sur un matelas roulé dans une des charrettes, Efeeralgan dort – A côté, Zamie marche, en s’aidant d’un bâton – Mamoru, qui marchait en tête, la rejoint.)

M – Ca va ? Pas trop fatiguée ?
Z – Ca va, j’ai un peu mal au dos avec ce sac, mais le bâton me soutient.
M – Il est costaud ce bâton. C’est quoi ?
Z – C’est celui de mon père, je ne sais pas…
(Mamoru soupèse le bâton et l’examine)
M - Un puissant bâton feuillu. Simple mais efficace. Tu sais t’en servir ?
Z – M’en servir ? Pourquoi faire ?
M – Ben pour te battre ! Qu’est-ce que tu sais faire ?
Z – Ben euh… Faucher du blé, faire de la farine, un peu de pain…
M – Non, mais, en combat ?
Z – En combat ? Ben… Papa et Maman n’étaient pas des guerriers, tu sais. Juste des artisans. Ils s’étaient retirés loin d’Amakna pour éviter les combats justement.
M – Mais… Ils ne t’ont rien appris ? Les techniques féca, les armes, tout ça ?
Z – Heu… Je sais mettre mes armures, lancer une immunité, une trêve… C’est tout ce que Papa m’a montré.
(Mamoru soupire et regarde Zamie d’un air désolé)
M – Bon… Tu connais quelqu’un en Amakna, au village ?
Z – Non, personne.
M – Et tu vas faire quoi, là-bas ? Comment allez-vous vous débrouiller ? Faire du pain et le revendre, c’est bien beau, mais s’il n’y a personne pour vous protéger, tu vas devoir apprendre à te défendre toute seule !
Z – Je… Je n’y avais pas pensé… Mais je n’ai jamais combattu que contre des pissenlits dans les champs !
(Zamie regarde son bâton, perplexe)
Z – Euh… Ca tape, ça ?
M – Oui, assez, au début. Je te montrerai si tu veux. Et quand tu maîtriseras mieux les techniques de base, on te trouvera un autre bâton. Je connais un bon sculpteur, Ramistofa, je verrai avec lui ce qu’on peut te fournir de bien.
Z – Oh… Merci !
M – C’est rien. Bon, on commence ce soir ? Après avoir installé le campement, OK ?
Z – D’accord… Eh, Mamoru ? Merci…
(Mamoru fait un signe de tête en souriant et repart à l’avant du cortège)

Aujourd’hui est un grand jour : nous avons fêté mon anniversaire, et je suis allée pour la première fois à la taverne pour autre chose qu’acheter de l’eau pour mon pain ! C’est Mamoru qui nous y a emmené tout à l’heure, il nous a offert, à Efee et à moi, un lait-gelée-fraise, et ensuite il m’a fait un beau cadeau : un superbe bâton ! Il m’a dit que maintenant, je méritais mieux qu’un feuillu, et que ce serait plus efficace. C’est vrai que ça fait 2 ans déjà que je combat avec le vieux bâton de papa, il était temps que je change… Et après, pour le tester, j’ai attaqué mon premier sanglier !!! J’avais un peu peur, mais Mamoru était derrière moi, et même Efee est venue m’encourager, elle m’a dit qu’elle était prête à dire les mots curatifs si j’en avais besoin. Elle est trop chou ! Je n’en ai même pas eu besoin, et même, je ne me suis pas vraiment servie du bâton, parce que j’avais tellement peur que j’ai tout fait pour que le sanglier ne m’atteigne pas ! Je n’ai pas arrêté de courir autour d’un gros arbre, et il ne m’a chargé que 2 fois… Du coup j’ai fini par l’avoir ! Mamoru était très fier, il dit que je n’ai plus rien à voir avec la « p’tite féca chétive » d’il y a 2 ans… Chétive ! Non mais ! J’ai 16 ans maintenant ! Je ne suis plus une « petite » féca ! Après, il a dit que j’étais susceptible… N’importe quoi !

Efee, elle, trop mignonne, elle m’a offert une belle amulette, et ce joli carnet, dans le quel je me suis promis d’écrire tout ce qui est important pour moi… Bon, ça peut être marrant, Mamoru dit que quand j’aurais encore grandi, ça me fera rire de relire à quel point je suis fière d’avoir gagné contre un sanglier, parce que j’arriverai à combattre des abraknides toute seule ! Il est gentil, mais pas très réaliste je crois…

Bon, il faut que je dorme maintenant, demain je dois m’entraîner : Mamoru doit m’apprendre à perfectionner mon glyphe agressif… Je ne sais pas pourquoi, les glyphes, je les pose toujours n’importe où, et une fois sur deux je me retrouve dessus ! Bon, j’espère qu’avec de l’entraînement je vais finir par y arriver… Je te dirai ça très vite, mon journal ! A bientôt !

Grande nouveauté ce matin : j'ai rencontré une fougère! Et pas n'importe la quelle... Une splendide, qui parle, rigole, et qui fauche le blé plus vite que moi! Une belle plante, quoi... Grande, avec une tignasse rousse terrible, et une faux à la main. Je l'ai rencontrée par hasard dans un champ de blé. Si je n'avais pas vu ses grands yeux pétillants et son sourire avenant, je n'aurais sans doute jamais osé lui adresser la parole : à mon avis, en deux temps trois mouvements elle est capable de m'aplatir comme un vulgaire tofu (quoiqu'un tofu, c'est jamais vulgaire, juste bête...)! Mais enfin, encore faudrait-il qu'elle en ait envie, ce qui m'étonnerais bien! je ne connais pas plus gentille Sadida... Ni plus drôle! On a fauché cote à cote un bon moment en discutant, on est presque du même âge! Du coup, on est resté ensemble une bonne partie de la journée, et j'espère qu'on se reverra souvent, ça me change d'être avec elle. Même si j'aime vraiment beaucoup la compagnie de Cheza, Kanchacra et Deirdre, n'empêche que ce sont avant tout les amis de Mamoru, et que je me sens vraiment minable à côté d'eux. Oh, bien sûr, il ne m'ont jamais reproché mes faibles capacités en combat, au contraire, ils sont adorables! Mais Hersinn (ah, oui, j'ai pas encore écrit : c'est comme ça qu'elle s'appelle ma fougère-copiiiiiiiiine!), c'est la première personne avec laquelle je me lie d'amitié sans l'intermédiaire de Mamoru! Ah! Vivement demain! Hersinn est aussi boulangère, et le matin on ira ensemble à la boulangerie!
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Parfois, ça lui prenait, à Zamie. Elle lâchait sa faux, abandonnait son pétrisseur, et se remettait sérieusement à l’entraînement… Le plus souvent, elle laissait dire, elle se moquait d’être si peu combative par rapport à d’autres, plus jeunes, et elle haussait les épaules quand on lui faisait remarquer qu’elle ne tapait pas fort et ne savait pas se protéger. Et puis, parfois, ça la mettait en rage et, soupe au lait comme elle l’était, elle mettait toute sa ténacité au service de son orgueil.

C’était l'époque sombre où les démons agressaient à tout va dans Amakna, et où les anges n’étaient jamais assez nombreux. Un jour où Zamie fauchait tranquillement du blé, rythmée par les coups de hache de sa sœur dans le bois tout proche, elle entendit Efeeralgan hurler. Elle lâcha sa faux et couru le plus vite possible, mais hélas juste à temps pour voir un démon estourbir le petite éni sans défense.

Prise de colère, la rage au ventre, Zamie se rua sur lui. Le bandit le regarda, mi-surpris, mi-amusé, mettre ses armures et s’armer de son bâton. C’est en riant qu’il fendit son casque en deux d’un coup d’épée, et, s’approchant d’elle, il commença à la détrousser alors qu’elle tentait vainement de retrouver ses forces pour une dernière attaque, pour sa sœur, pour l’honneur… D’une pichenette, se gaussant de ses efforts désespérés, le démon la fit tomber face contre terre avant de s’éloigner.

Zamie pleurait de rage, les poings serrés, martelant le sol. Elle l’aurait un jour, elle l’aurait, lui ou un autre, un de ceux qui profitaient de leur puissance, qui l’utilisaient si mal, qui FAISAIENT si mal…

Elle se redressa doucement et s’approcha d’Efeeralgan. Celle-ci était toute fable et pâle, elle se soignait calmement, les yeux emplis de larmes. « Il m’a prit ma hache, Zam… Comment je vais faire pour couper du bois, moi, maintenant ? » « Je t’en trouverai une autre, puce… »

Son bâton avait disparu lui aussi, le cadeau de Mamoru. Elle jeta un regard désolé sur Efee, avant de détourner la tête : elle s’en voulait, elle n’était même pas capable de la protéger. Une rage soudaine l’envahit. Elle coiffa son lorko abîmé, se planta droit devant un arbre, et se prépara… « Ils vont voir, un jour, ils vont voir » et à voix haute : « Efee ? Aide-moi, puce, compte ! Je vais l’avoir ! »

La petite éni se placa à coté de sa sœur. Zamie fixait l’arbre, les mains frémissantes, elle voulait, cette fois-ci, que son attaque soit à la hauteur. Elle voulait se prouver à elle-même qu’elle en était capable.
- 1, 2, 3…
Les mains de Zamie commencèrent à vibrer.
- 4, 5…
Son regard planté dans l’écorce.
-6, 7…
« Je peux le faire, je peux, il le faut… »
- 8…
Ses mains se levèrent, doucement, vers le ciel.
- 9…
Des étincelles qui apparaissent entre les doigts crispés.
- 10 !
Au dessus de la tête de Zamie, entre ses mains, un éclair fulgurant, un bruit de tonnerre.

Face à elles, l’arbre fumait. Il ne restait plus de lui qu’une souche calcinée…
Efeeralgan prit la main de sa sœur, leva son visage vers elle en souriant. Zamie déposa une bise sur son front.
« Bon, j’y retourne, repose-toi, puce… »
La jeune féca ramassa sa faux et repartit vers les champs...

Ben tu sais quoi, Air? On l'a pas volé, ce godet! La vache, saletés de scarafeuilles! J'ai bien cru que j'allais y laisser une mèche de cheveux cramés. Je déteste ces flamèches! Heureusement que tu étais là! Bon, qu'est ce que tu prends? ... OK, alors va pour 2 bières!... Rho, t'es gentille!... Oui, je sais, t'as raison, je résiste pas si mal, mais pour ce qui est d'amocher la bébète en face! Sans rire, on dirait un tofu neurasthénique! Mes attaques, ça casse pas 3 pattes à un bouftou... Allez, à la tienne! Hm, pas mauvaise cette petite mousse... Mais non, Air, je ne fais pas diversion, mais que veux-tu que je te dise? Je tape pas, je tape pas! Tant que je ne me fais pas trop amocher... Oui, c'est peut-être ça, il me faudrait une meilleure arme. Wahou, ah oui, comme celle-là, ça aiderait! D'où tu sors ça, toi? Tu me le donnes?! Non, tu délires? Je peux pas accepter! J'ai rien à t'offrir en échange à part quelques verres ici... Un poème?! T'es pas sérieuse! Tu vas pas m'échanger ce bâton contre un poème! Ici? Devant tout le monde?! Oh... Bon, OK... Attends, je me prends une autre bière pour me donner du courage... Bon, hm, hm...

"Si t'as un problème, appelle Air,
Elle arrive et tape comme l'éclair,
Les grosses bêtes, elle n'en a que faire,
Elle les expédie en enfer!
Pour rigoler, ça marche aussi,
Tu peux l'appeler, elle s'ra ravie.
Descendre un godet, elle sait l'faire,
Cette Xélorette ne manque pas d'Air!"

Rho, ben je dois être toute rouge, là... Ressers moi une bière, tiens, ça me fera oublier les iops là-bas qui rigolent de moi! Si, regarde derrière toi, au fond, le groupe de 4! Tiens y'a Zell-Clad avec eux, un ami de Keazou. Oui, je sais, tu ne t'entends pas avec Keke. Ben, que veux-tu, je fais avec, hein! Je vous vois séparément, c'est tout! Allez, trinque! Si c'est mon frère? Ben oui! Euh... Enfin presque. Euh... Enfin non, mais c'est tout comme : c'est mes parents qui l'ont élevé, alors... Oui, ils l'ont trouvé un jour, braillant dans la forêt, il était tout p'tit, tout seul, et mes parents l'ont gardé. Mais pas longtemps, hein, un iop, dans ce village pacifiste, ça pouvait pas l'faire. Alors il l'ont très tôt envoyé se former chez un maître iop, histoire que sa force serve à autre chose qu'à faucher du blé! J'étais toute p'tite, moi, me souviens plus trop... Oups là! Elle tape fort cette bière, surtout la dernière, non? Ah ouais, c'est la 7ème, c'est p't'être pour ça... Gné? pourquoi tu rigoles?...
Naaaaaaaaaaaaan, j'ai pas trop bu, c'est pas vrai... Juste assez pour me remettre de mes émotions... Et faire un peu la fête... Et te réciter un poème, ok, bon, t'as raison, j'en ai p't'être pris une de trop... Aille! Non, non, ça va! Je ne suis pas tombé, c'est pas vrai, je... Je... Je voulais juUUuuste m'asseoir par terre, un tout pitit peu, lààà... Et d'abord, je nepeva... Je peneva.... Je NE VEUX PAS remonter sur ce tabouret... L'est trop haut... Et pis ch'uis bien là, il est confro... Contor... ConFORtable, ce plancher...
...
zzZZZZZzzzzzzZZZZZzzzzzz...

Zamie commençait à avoir mal aux mains. elle sentait une vilaine ampoule apparaître, à l’endroit où le pétrisseur roulait sans cesse dans sa main droite. Elle en était au 37ème pain, son client lui en avait commandé une cinquantaine. Le travail ne lui faisait pas peur, elle avait l’habitude, mais là, vraiment, c’était insupportable. Dans la boulangerie, le vacarme était assourdissant et son commanditaire, un vieil énutrof acariâtre, était vraiment pénible : il n’arrêtait pas de gesticuler autour d’elle, la pressant à aller plus vite, il s’énervait dès qu’elle prenait le temps de renseigner un apprenti boulanger, et lui jetait des regards noirs dès qu’elle marquait une pause pour soulager ses bras.

39, 40… Zamie se tourna vers l’énutrof pour lui annoncer en souriant qu’il de restait plus que dix pains à cuire, ce serait bientôt prêt. Il se contenta de bougonner que ça irait bien plus vite si elle cessait de bavarder tout le temps… Zamie se tourna vers son four et réprima une grimace…

A cet instant, un tofu fit son entrée dans la boulangerie, et se mit à y voleter en tout sens, poursuivi par une jeune osamodas : « Béco, revient ici tout de suite ! Allez, dépêche-toi ! » Mais le tofu n’en faisait qu’à sa tête. Il passa près de Zamie en piaillant et se prit les pattes dans son sac de levure qui s’écrasa sur le sol. Zamie en profita pour l’attraper et le remis à sa maîtresse, qui la remercia, rouge de confusion : « Oh la, la ! et votre levure? je suis désolée !» « C’est rien, je vais en racheter, il y en a plein ici… » Mais son client aigri l’interrompit : il avait déjà attrapé l’osamodas par l’épaule, et la secouait en vilipendant sa négligence. Zamie essaya de s’interposer, autant pour protéger la jeune invocatrice de ce vieillard furibond que pour ménager son client. Ce dernier se tourna aussitôt vers elle, et se mit à aboyer de plus belle : « Et mes pains ? Hein ? Ils vont se faire tout seuls ? et sans levure ? Je ne vous paye pas pour bavarder ni pour jouer à la SPA ! Alors plus vite que ça ! »

* BLOP *

L’osamodas et son tofu n’étaient plus là, et le silence s’était fait dans la boulangerie. Tous les regards étaient tournés vers Zamie. Face à elle, l’énutrof était bouche bée, sa tête émergeant de son chapeau troué, qui lui faisait une collerette ridicule, comme si quelqu’un en avait attrapé les bords pour le rabattre violemment sur ses épaules. Un pain était écrasé sur son crâne dégarni.

Zamie restait interdite. Que s’était-il passé ? Elle fit un pas vers son client pour lui ôter le pain du visage, et aussitôt celui-ci leva les mains devant son visage comme pour se protéger en criant, tel une dragodinde effarouchée. Zamie interrompit son geste et fit un pas en arrière. L’énutrof en profita pour prendre la tangente, abandonnant là sa commande et sa pioche.
La féca regarda autour d’elle, cherchant une explication. Elle se tourna vers son voisin, mais celui-ci se détourna aussitôt, faisant mine de s’absorber dans la confection d’un petit pain. Zamie réalisa que toutes les personnes présentes fuyaient son regard, tandis que l’activité reprenait peu à peu dans la boulangerie. Gênée et inquiète, Zamie ramassa ses affaires et se dirigea vers la porte. Quelques boulangers s’écartèrent devant elle, comme s’ils craignaient quelque contagion.

Zamie s’éloigna du village, encore hagarde, et s’installa au calme pour réfléchir… Mais qu’est-ce qui s’était passé?

Alors là, ça allait mal. Tellement mal que Zamie allait devoir se résoudre à faire quelque chose qu'elle évitait soigneusement la plupart du temps : réfléchir.
Ces trous noirs de plus en plus fréquents l'inquiétaient, il fallait qu'elle y trouve une explication...
Elle s'installa au calme et déroula un parchemin : elle avait décidé de mettre à plat ses souvenirs et les indices qu'elle avait, pour reconstituer le puzzle... Et surtout en trouver les pièces manquantes. Elle décida d'établir une liste de ses dernières "absences" :

"Lundi, réveil sous l'escalier de la taverne, vers 2 heures du matin.
Dernier souvenir précédent : je faisais un concours de vidage de chopine avec un zooooornaliste.
Conclusion : normal."

Zamie sourit presque à l'évocation de ce souvenir : oh, la, la, quelle torche! Les zooooornalistes étaient imbattables sur ce terrain, des adversaires sérieux pour ce genre de compet'...

"Mercredi dans l'après-midi, je me retrouve les mains attachées dans le dos et accrochée à un arbre.
Dernier souvenir précédent : j'étais avec les Otori, nous nous battions ensemble contre des abraknides rebelles, et j'étais doublement encerclée par une escouade d'araknées qui se multipliaient plus vite que je n'arrivais à les abattre.
Conclusion : pas normal."

Zamie se gratta la tête, perplexe, ce qui eut pour conséquence de faire apparaître une vilaine tache d'encre sur son front. Non, ça ne collait pas. Et depuis, d'ailleurs, elle n'arrivait pas à joindre les Otori : ils restaient comme sourds à ses appels télépathiques... Elle soupira, et repris sa liste :

"Jeudi matin, réveil dans une maison inconnue, avec un iop non moins inconnu à mes côtés. Il a l'air abruti quand il dort, mais pas sûr que ce soit uniquement quand il dort. Dans le doute, je me téléporte dehors et je file.
Dernier souvenir précédent : à une soirée chez... Fureur je crois? Bref, à une soirée, un iop ressemblant étrangement à celui du réveil mais en moins décoiffé remplit mon verre non stop en essayant d'être drôle.
Conclusion : normal."

Zamie fronça les sourcils. D'un trait de plume, elle barra le "normal" qu'elle remplaça par "explicable", en soupirant.

"Jeudi soir : réveil aux côtés de Sylphes, qui ronfle, au milieu d'un bon paquets de bouteilles vides dans ce qui lui sert de maison / bar près du port.
Dernier souvenir précédent : les 2 mêmes, réveillées, avec les bouteilles pleines, nous discutons de mon "problème avec les iops" dixit Sylphes.
Conclusion : normal.

Aujourd'hui enfin, le papy de la boulangerie couvert de pain, alors qu'aux dernières nouvelles il était plus occupé à me crier dessus qu'à se faire un couvre-chef d'une brioche.
Conclusion : pas normal."

Bon. Elle commençait à y voir plus clair. Ces absences se classaient en deux catégories : les alcoolisées, et les autres. Ce qui n'expliquait pas pour autant ce qui avait provoqué les autres. Mais là, au moins, il y avait des témoins.
Inutile d'essayer de remettre la main sur l'énutrof, mais il restait les Otoris. Et le fait que Zamie ait l'impression qu'ils la fuyaient depuis cette absence lui confirmait l'idée qu'il y avait quelque chose à creuser, là...

Elle se releva, glissa le parchemin dans sa besace, et se dirigea vers le laboratoire des alchimistes : Oopsi finirait bien par y passer tôt ou tard. Lui, ne lui refuserait pas son aide. Ou alors, c'était que vraiment...

Au laboratoire d'alchimie, comme d'habitude, l'ambiance était calme mais l'environnement bruyant. Ammassés dans le seul laboratoire d'Amakna, les alchimistes de toutes classes et de tous niveaux s'affairaient autour des alambics et des paillasses. Des fumées colorées de glissaient au dessus des têtes, des liquides transparents bouillonnaient gaiement, et les savants se concentraient à en devenir écarlate au milieu du cliquetis des éprouvettes et des fioles en verre délicat.

Zamie cherchait Oopsi au milieu de ce capharnaüm étrange, passant d'une paillasse à une autre, tandis que celui-ci, justement, se faufilait discrètement vers la sortie, essayant de se soustraire à son regard... Il passait derrière un alchimiste, puis un autre, s'en servant comme de paravents pour couvrir sa fuite et progresser vers la porte du laboratoire. Mais après un iop et un sadida, il se retrouva derrière un xélor, qui ne cachait de lui que les jambes, et encore...
C'est à ce moment là que Zamie se retourna et se retrouva face à lui, de l'autre côté de la paillasse. Son visage s'éclaira immédiatement :
"Oopsiiiiiiiiiiiiiiiii! Enfin!" gazouilla-t-elle en se dirigeant vers son ami.
La réaction du cra ne fut pas vraiment celle à laquelle elle s'attendait. Oopsi banda son arc et le pointa sur elle, en s'écriant:
"Sors de ce corps, Eimaz!"

Zamie éclata de rire, puis réalisa que la flèche était bien réelle, et que son ami ne plaisantait pas...
"Eimaz? Mais... Oopsi, c'est moi! Zamie!"
Oopsi restait silencieux. Il envoyait des messages télépathiques à sa guilde, appelant Mamoru, Air et les autres à la rescousse, sa flèche toujours pointée sur une Zamie interloquée...

Dépositaires : Mamoru, meneur de la guilde "Otori", Phoenix, Air, Ramistofa, Oopsi, Finza, Adonis, membres de la guilde "Otori".

Liste des méfaits commis par Eimaz lors de sa prise de possession de Zamie le 09 jouillet 631 vis-à-vis des membres de sa guilde à l'occasion d'un combat contre un groupe d'abraknides dans la forêt sombre :

- a mangé plus de la moitié de la gellocoiffe d'Air en menaçant de lui "bouffer la tete si t'es pas contente s'pece de blondasse",
- a tondu tous les bouftous invoqués par Finza,
- a brûlé la barbe d'Adonis à coup de flamiches, et a tenté de lui brûler d'autres parties de son anatomie pourvues de pilosité,
- a réduit en cendres les plus belles flèches d'Oopsi et l'a menacé de lui couper les cheveux pendant son sommeil,
- a plumé presque intégralement le bwack de Ramistofa et l'a traité de "coucougnette de mama-bwork" (« ce qui montre bien qu'elle n'avait plus toute sa tête » dixit Ramistofa).

Ses victimes se sont déclarées aptes à se défendre contre ces agressions, mais n'ont pas osé, troublés qu'ils étaient à l'idée de devoir porter la main sur leur amie.

En conséquence de quoi, Mamoru et Phoénix, également présents, ont déclaré ce qui suit :
Avant qu'elle ne commette d'autre carnage, Mamoru a immobilisé Zamie, tandis que Phoenix sortait une longue corde. Ils l'ont baillonnée et attachée à un arbre, et l'ont laissé là, en espérant que la crise se passerait.

Déclaration sur l'honneur, pour faire valoir ce que de droit, signée par Mamoru, représentant légal de la guilde "Otori", et du représentant de la mairie d'Amakna,

Fait à Amakna
Le 15/07/631

oh dame zamie s'il vous plait j'attend la suite

magnifique, faites publier un livre, ça va faire un malheur!!

Bravo, toujours aussi splendide !
Evitez quand-même trop de commentaires, ça coupe le récit...

( Je trouvais l'original plus coloré, pas vous ? ^^ ) ( Juste une boutaaadeuh ! )