Chroniques de Kaw'...

Voici le début d’une nouvelle œuvre. Etant plus doué avec une plume qu’avec ma langue, je me lance dans l’écriture de ma vie de tous les jours… De ma vie de mercenaire. Ma vie de membre du clan de Sériane-Kerm.

Je ne souhaite pas faire ici ma biographie directe : raconter ma naissance, deux ou trois évènements de ma vie n’aurait aucun intérêt. Je préfère de loin que vous me découvriez vous-même. Je désire, dans les lignes qui suivent, donner mon avis sur le monde qu’est celui du mercenariat… Donner mes impressions sur les évènements ayant frappé notre univers… Et pourquoi pas, vous offrir une nouvelle vision de moi-même. Les clichés dans ce monde sont malheureusement omniprésents, et si je peux contribuer à leur disparition…

Commençons par cette chaude et belle journée d’Aperirel, le 25 de ce mois, plus précisément. Alors qu’en même temps que l’aube se levait, mon esprit regagnait peu à peu mon corps, je m’éveillai, pas encore totalement conscient de l’importance du jour que je vivais en ce moment précis. Plein de joie, d’espoirs et de bonne volonté, je m’attelai aux tâches quotidiennes. La matinée semblait passer à toute vitesse, alors mon cerveau bouillonnait à m’en rompre le crâne… Préférant de loin le contact de ma terre natale au goudron urbain, je m’aventurai déjà dans le zaap d’Astrub partant pour celui d’Otomaï alors que l’astre solaire atteignait son zénith. Que cet air me faisait du bien ! Mains dans les poches, j’avançai, alors que j’écrasais le sable doux de la plage. J’avais besoin de cette solitude. Certains hommes aiment la fête, les explosions, les effusions de bières ou d’hémoglobine… Pas moi. Ayant toujours mis un point d’honneur à carburer à la sérénité, je m’immobilisai, fixant l’horizon.

J’avais refermé mon esprit. Ainsi, je ne voulais pas laisser une quelconque vague, un nuage vagabond troubler ma concentration. J’organisai, pour la première fois depuis bien longtemps dans cette vie, mes projets. Alors que mes neurones se démenaient à en exploser, je voyais enfin en clair certains objectifs de mon existence sur ces terres. Au rythme de la rosée encore fraiche du matin qui s’écoulait des arbres, mes pensées s’emboîtaient, changeaient de sens. Combien de temps suis-je resté là, à laisser mon esprit battre la campagne ? Quatre heures… Peut-être même le double. Tout ce que je peux décrire avec perfection, c'est la tonalité de la voix qui résonna dans mes os à la manière d’un gémissement d’ours étouffé par sa caverne. Je me relevai dans un violent sursaut, et alors que me main se rabattait sur mon clint pour cacher mon visage, je m’en allai, aussi serein qu’a mon arrivée.

Chaque souffle de vent me semblait familier, chaque craquement de branche avait l’air de vouloir me conter sa vie comme si j’étais son confident, chaque « plouf » de l’eau résonnait dans ma conscience tel un appel à l’aide. J’étais chez moi, ici, à Otomaï. Me frayant un passage dans les hautes herbes, dans lesquelles j’avais appris à marcher, mon pied s’enfonça dans une fourmilière, ce qui laissa ses hôtes aussi déstructurées que mes pensées, aussitôt desassemblées. Cette solitude monotone qui s’était installée en moi fut rapidement balayée d’un souffle renouveau de vie, et une dizaine de minutes plus tard, mes jambes fendaient l’air à la vitesse des Flèches de Crâ. Le rictus de concentration qui ornait mon visage laissa place à un sourire brillant, et je me jetai heureux dans l’azur de la porte bleutée me téléportant à nouveau en Amakna.
Le choc me heurta en pleine face, et ce calme que j’avais mis près d’une dizaine d’heure à instaurer en moi se désarticula tel un pantin. La Terrible Urbanisation avait repris le dessus. J’ai appris, durant mes mois de mercenariat, à ne pas me laisser berner. A me forger un avis sur chaque chose, à analyser chaque évènement bouleversant ce triste monde. Un bon Sériane se doit de ne jamais se faire manipuler par les avis extérieurs, tout en les intégrant à ses diagnostics.

Vingt-quatre heures plus tôt, tout mon clan avait souffert. Un disciple de Féca, du nom d’Albin, avait réussi à semer la zizanie en pleine soirée de promotion du clan. On pouvait constater en grandeur nature les conséquences désastreuses qu’un être malfaisant pouvait causer dans son entourage : le même petit féca s’était jugé apte à prendre en otage Hygo, membre du clan. Jamais, ô non jamais, ne devons-nous nous ériger en juge de la vie des autres, sans raison valable. Le mécréant avait commis une erreur irréparable, en s’autoproclamant ainsi en bourreau.

La perte d’honneur que le Clan avait subi en ce jour réclamait justice ! Et la seule qui convienne, est la mort ! Sur ce point, tous les membres du clan étaient unanimes. Mais pour le moment, le petit Féca rouge était le cadet de mes soucis. En effet, une force bien plus puissante m’attendait pour me broyer si je n’accélérai pas le pas. L’herbe laissait place au blé, et les cabanes de bois aux habitations en pierre de la région. Et alors, je m’immobilisai, arrivé à mon objectif : devant moi se trouvait l’Eglise du continent… Oh, j’ai oublié de le marquer… En ce jour, je me mariai. Comment ça, c’est important ? Et bien maintenant, vous savez.

Que dire de ce mariage ? De cette fête ? De tout ce bruit, de toutes ces promesses, de tout ce bonheur condensé en une soirée unique et si… parfaite. L’Île au Milieu des Vagues… Voilà une de plus belles phrases de l’éthique du Clan. En cette soirée, j’accueillais une nouvelle personne sur Mon Île : ma femme, Sue-Shi, apprentie du clan depuis la veille. Mon épouse, ma conjointe, ma dulcinée, mon âme sœur…
Raconter cette soirée n’aurait pas grand rapport avec le but premier de ces écrits, et ainsi, je vous conterai avec plaisir les évènements de la soirée en tête à tête.

Pour revenir à notre maxime, j’aime l’interpréter de cette manière : « Demeure tel une île au milieu des vagues, mais récupère les trésors que la Nature laisse sur ta plage…». J’avais beaucoup appris en cette seule journée. Le crépuscule pointait son nez que déjà de nouvelles interrogations se fixaient en moi, toujours plus nombreuses et plus tenaces…



Je me levai, bien difficilement. Laisser tout ça derrière moi, même pour quelque jour, me répugnait : pourtant, il le fallait. Aujourd’hui, en ce 26 Aperirel, je décide de me mettre en quête de l’inconnu. Cela peut paraître ridicule au premier regard, mais ça ne l’est pas pour moi. En cherchant, on trouve. Quoi ? Ca, c’était une autre affaire. Le monde était un mystère ! Pourquoi ne pas rendre les recherches mystérieuses ? Je posai un pied devant l’autre, perdant en appréhension à chaque pas, à chaque respiration… Je reviendrai plus fort, plus grand, plus mercenaire que jamais : j’en suis sûr…

A l’heure où je vous écris, je me trouve entre mes terres natales et l’archipel polaire de Nowel… Ca vous surprend ? Oui, je suis en mer. Quel joie de se laisser guider par les éléments et quel bonheur de savoir que Dame Nature est aux commandes ! L’air salé de l’océan me fait du bien. Qui sait… Si le clan ne m’avait pas ouvert les bras, je serai certainement devenu marin. Sur le bateau, le travail ne manque pas. Alors que le soleil m’aveugle de ces rayons, je joue de la plume, tirant un enseignement de chaque minute de répit qui s’offre à moi.

Encore une fois, j’ai pu constater avec surprise les succès de la méditation. Se plonger dans ses propres pensées, sa propre vision du monde est une expérience passionnante que je conseille à tous. « Sache vaincre toute fatigue de ton corps, toute défaillance de ton esprit »… Voilà encore une belle phrase du clan. Un sériane se doit d’être bien dans son corps, et dans son âme ! Prenons un exemple de la vie que je mène en ce moment… Lorsque la mer est lisse, on peut analyser toutes ses caractéristiques… Notre reflet y est parfait… Mais au moindre soucis, à la moindre petite intempérie… Tout se trouble.

Pour l’anecdote sur l’île, j’ai remodelé la phrase de manière à lui donner un sens pour moi. Pour celle-là, j’écrirai qu’il faut « savoir équilibrer sa vie plus précisément qu’une balance, se maîtriser davantage que le marionnettiste ne le fait avec son pantin ».
Ah, j’écris, j’écris, mais le travail n’avance pas ! Je vous promets quelques mots de plus demain !

Kaw’

Second jour d’absence du continent… Me voilà seul. Ayant quitté mes amis marins pour la journée, j’ai décidé de consacrer ces quelques heures à mon entraînement. La force de l’esprit est une arme redoutable, mais j’avoue à contrecœur que sans une bonne arme dans la main, on n’est pas grand-chose, dans ce monde. N’oubliez pas que l’âme est aussi importante que le corps… Une arme légendaire, aussi puissante soit-elle, ne sera d’aucune utilité, équipée à un brin d’herbe, et vice-versa.

Ainsi, j’ai décidé de faire d’une pierre deux coups, et de tirer de chacun de mes affrontements un enseignement moral, que je pourrai utiliser lors de nouvelles confrontations, ainsi qu’une expérience de combat indispensable. Les temps se font durs, ainsi ai-je décidé de ne plus jouer à la souris. C’en est à mourir de rire ! Nous sommes les mythiques mercenaires des Dieux, les successeurs de l’héros Sériane-Kerm ! Et nous nous laissons annihiler par des abrutis… Il est temps de réagir.

Ma foi, au départ de mon voyage, j’ai pu repartir le cœur plus léger sur ce point,
heureux de constater que le projet « Lames de Kerm » allait pallier ce problème. Parmi ce groupe d’élites se trouvait une multitude des personnes dans lesquelles j’avais mis toute ma confiance…

Faire confiance à quelqu’un, ce n’est pas rien. Sachez que gagner la confiance d’une personne est un travail de tous les jours, et qu’elle fait partie des biens les plus volatiles : un travail de toute une vie peut se briser en une fraction de seconde. Si je devais également écrire une phrase, elle serait la suivante : « Ne faîtes confiance à personne sans raison, et n’hésitez pas à vous remettre en question ». En effet, la confiance, c’est aussi un travail que l’on fait sur soi-même.

J’ai pu rencontrer des guerriers, et même membres du clan, ayant perdu la confiance en eux. Sachez que douter de sa propre personne est la PIRE ennemie, et la plus grosse erreur que vous puissiez commettre dans votre existence (si elle n’a pas contribué à vous l’écourter)…
Prendre du recul à chacun de ses jugements et ne pas se faire confiance sont deux choses totalement différentes. Il faut être conscient de ses capacités tout en ne laissant notre égo nous aveugler…

Voilà la plus grande leçon que j’ai tirée de ma méditation quotidienne… Je pense qu’elle m’aidera bien plus que je ne le crois dans ma vie future…
Je suis fatigué. J’écrirai la suite demain…




Me voilà de nouveau en route vers le continent… J’ai beau avoir apprécié le voyage, il m’est impossible de rester si loin de tout si longtemps : ma femme, le clan me manquent terriblement. Les uniques objectifs de cette épopée était de perfectionner mes techniques de combat et de mieux analyser le monde environnant… Dans ces deux domaines, j’ai fais un pas de géant. Ainsi, je reviens, serein.

A l’heure où j’écris ces mots, le soleil se couche déjà. Dans un bateau légèrement plus grand que celui de l’aller, je suis installé dans mon lit, essayant de faire le point sur tout ce qui m’est arrivé…
J’ai pu découvrir de nouvelles cultures, de nouveaux visages. Il est extrêmement important pour un membre du clan de se faire sa propre vision du monde qui l’entoure : en effet, la communication est omniprésente dans le clan.

Cependant, je pense qu’il faut faire la différence entre le fait d’« interagir avec les autres cultures » et « prendre le parti d’une autre culture ». Ce sont, bien sûr, deux choses complètement différentes, et je compte bien vous le démontrer, preuves à l’appui.

Les Bontois et Brakmariens ont une doctrine bien spéciale, qui consiste en « aimer ou ne pas aimer ». Les membres du clan de Sériane-Kerm se basent sur le respect. Là est l’immense fossé qui nous sépare des ailes blanches et des cornes rougeâtres ! Peut-on vraiment aimer notre pire ennemi, en toute objectivité ? Rien n’empêche le fait de respecter son adversaire, si cela est réciproque.
Je débattrai volontiers pendant des pages, tant le sujet est intéressant. Encore une fois, j’aime poser les grandes lignes sur ce papier, quitte à éclaircir quelques ombres en tête à tête.

En cette belle nuit éclairée de lune, l’inspiration me vient de donner mon propre avis, une nouvelle fois, sur l’une des plus grandes phrases du clan, dictant les actions de ses membres : « Mets un point d’honneur à n’avoir d’autre serviteur que toi-même.». Elle rayonne de sens. Ces quelques mots signifient que chacun est le forgeron de la clef de la porte de son avenir !
Rien n’est gratuit dans ce monde, et je peux vous assurer que la meilleure des monnaies, c’est la sueur du front ! « Rien ne se perd, rien ne se crée… Tout se transforme ». Cette phrase n’est pas de moi, mais puisqu’elle est parfaitement adaptée, pourquoi s’en passer ?
Je me laisse au ballottement des vagues… Choisir de ne rien faire, c’est aussi la liberté.
Ce voyage n'était pas forcément beau, ou magnifique, dans le sens où de beaux paysages se sont offerts à moi. Cette première partie ne cherchait pas à expliquer mon histoire. Cet oeuvre témoigne juste de l'expérience que cette aventure m'a apportée.
Je compte bel et bien me lancer dans l'écriture de ma vie d'avant. Et pourquoi pas de ma vie de maintenant, et même de celle que je vivrai...
A bientôt, pour de nouvelles aventures...

Kaw’

Partie II - …